Nuances de plume

Nuances de plume

Enfant migrant

 

Enfant de migrant,

petite vie naissante et si fragile 

qui a vu le jour

sur une embarcation d’infortune

parce que ta famille, ta mère,

fuyant la misère, la persécution, la guerre,

ont cru en l’obscure promesse des passeurs

d’un avenir paisible et meilleur, ailleurs.

 

Enfant migrant,

parti seul ou avec les tiens,

dans des conditions inhumaines, 

la terreur au ventre,

sur un dérisoire canot pneumatique

lancé au gré incertain des flots,

dérivant à la merci des courants,

au risque de chavirer à tout instant.

 

Enfant migrant,

pour toi qui atteindras la terre ferme,

peut-être secouru par un navire humanitaire,

combien de tes compagnons de misère 

auront péri noyés en mer,

saisis par les froids remous de la mort,

dans un effroyable sentiment d’abandon ?

 

Enfant migrant,

combien de jours d’épouvante 

se seront passés,

de combien de ports 

auras-tu été lâchement refoulé

avant que tes pieds ne touchent le sol

et que trop peu de personnes dévouées

ne t’apportent des premiers soins indispensables

alors que tant d’autres, ici, 

ne veulent pas de toi ?

 

Enfant migrant,

quelle sera ta vie dans ce pays inconnu

où, en fait de liberté et d’abondance,

t’attendent l’angoissante situation 

de demandeur d’asile,

les grilles des centres de rétention administrative

et, trop souvent, l’abominable état de clandestin

avec la rue, la faim, le froid, la peur 

pour toute prospérité ?

 

Enfant de l’exil,

ta condition tragique étreint mon cœur,

elle me touche et m’interroge

car elle me rappelle deux autres enfants migrants

fuyant la persécution, la mort…

Ces enfants étaient mes grands-parents

 

Enfant migrant,

je voudrais que tu aies leur chance,

malgré les épreuves qu’ils ont dû subir.

Je voudrais que tu puisses trouver ta place ici

et que plus tard, quand tu auras vieilli,

tes descendants soient fiers

d’être les petits-fils et les petites-filles 

d’un enfant de l’exil,

d’un aïeul venu d’ailleurs, de loin.

 

 

 

Juin 2018

 

Ce poème m’avait été inspiré à l’époque par l’errance des navires humanitaires l’Aquarius et le Lifeline, qui avaient été refoulés de plusieurs ports et avaient longuement erré en mer avant d’être enfin autorisés à accoster, ainsi que par les trop nombreux naufrages d’embarcations de migrants et par la situation dramatique de ces personnes forcées à l’exil.

 

Depuis, la situation ne s’est guère améliorée, les migrants qui tentent le passage vers l’Europe par la Méditerrannée ou vers l’Angleterre la Manche s’exposant à faire naufrage, et des navires humanitaires essayant de les secourir.

Ces jours derniers encore, il a été question de l’Ocean Viking et d’un autre navire cherchant un port où accoster pour débarquer les migrants qu’ils avaient secourus.

 

 

Moi-même petite-fille de migrants, je dédie ce poème à tous les migrants d’aujourd’hui, enfants et adultes, avec une pensée particulière pour ceux qui sont morts noyés, et aux bénévoles qui tentent de sauver ces êtres en déserrance.

 

 

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06/11/2022
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