Le show du marché
Maraîcher arboriculteur de son état,
tous les samedis matins au marché du bourg
il fait le show en vendant ses produits à la criée.
Affublé d’un grand chapeau de paille
agrémenté de brindilles et de feuillages,
de sa voix de stentor résonnant sur la Grand’Place
il interpelle jovialement le chaland et la ménagère.
“Qu’ils sont magnifiques, mes fruits !”
Qu’ils sont superbes, mes légumes !
Rien qu’ du bon, du goûteux, du généreux !
Récolté ni trop tôt ni trop tard, pile à maturité !
C’est du local, pas du importé de j’sais pas où !
C’est cultivé avec patience et en plein champ !
Et tiens ! Pour pas plus cher au poids,
j’vous mets la terre avec, bonus gratos !
Allez-y, m’sieurs-dames, faites vot’ choix !
Les fruits et légumes, c’est excellent à la santé !”
S’occupant d’un homme d’environ la quarantaine
qui regarde les cageots des diverses salades,
il suggère : “Promo sur les feuilles d’ chêne.
Après, brune ou blonde, ça c’est comme pour les dames,
c’est affaire d’préférence personnelle !”
Plaisantant avec une cliente aux cheveux grisonnants,
visiblement habituée de son étal :
“Bien l’bonjour, M’dame la mère de M’sieur l’Maire !
Qu’est-ce qui vous f’rait plaisir aujourd’hui ?
Deux tomates cerises et une jeune carotte
ou deux patates et un concombre bien ferme ?”
Trait de grivoiserie auquel tous deux rient de bon cœur.
Sortant ensuite de l’arrière de son fourgon
deux sacs en papier préparés d’avance,
il s’empresse de les apporter à une grand-mère
à qui il s’adresse avec une pointe de tendresse :
“Ah ! Ma mamie préférée ! J’vous attendais !
V’là c’que vous m’avez d’mandé au téléphone,
des jolies cerises bien rouges et bien juteuses,
des abricots mûrs à point pour qu’ils soient pas trop durs,
deux courgettes qu’j’vous garantis faciles à éplucher
et d’la scarole déjà toute lavée et essorée.
Faites don’ voir vot’ caddie, qu’j’y mette dedans !”
Puis donnant une poignée de main vigoureuse
à un copain qui vient d’arriver à vélo :
“Salut, Jeannot ! Alors, prêt pour l’Tour d' France ?
Tiens, j’ai les deux kilos d’fraises à confiture
qu’ta femme a réservées la s’maine dernière.
M’est avis qu’tu vas t’régaler, les cinq doigts et l’pouce !”
Avisant un couple avec poussette
du côté des plateaux de fruits,
à la maman qui choisit des pêches il dit :
“Les meilleures sont celles qu’ont la peau douce,
un peu comme celle des fesses d’vot’bébé !”
Ce à quoi la jeune mère sourit en regardant son rejeton
qui, lui, s’en fiche éperdument, tout occupé à babiller.
Et au papa qui semble hésiter devant les melons,
il conseille de les soupeser, en expliquant :
“C’est comme avec les femmes, voyez-vous,
faut en avoir suffisamment dans la main.”
Maraîcher arboriculteur réputé au marché du bourg,
tous les samedis matins il fait le show
affublé de son chapeau de paille champêtre.
Et tant pis si son humour est un peu lourdingue,
les gens l’apprécient pour sa sympathie
et pour la qualité de ses produits de la terre.
Quant aux primeurs alentour, ils ne savent plus
que faire pour ramener la clientèle à eux.
(Mai - juin 2022) 👒🌿
Poème inspiré en partie, surtout pour la gouaille du personnage principal, par un vendeur du marché où ma mère se rendait tous les samedis matins (et moi avec elle) quand j’étais toute jeunette encore 🥬🍅🥕🥔🥒🍒🍓🍑🍈 Ce vendeur, qui proposait essentiellement toutes sortes d’olives assaisonnées 🫒 était surnommé "La grande gueule" pour son bagou et sa voix qui dominait le tumulte ambiant 🤭
Le remplacement de certains "e" par des apostrophes dans les paroles du maraîcher-arboriculteur de mon poème est destiné à restituer le parlé populaire.
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